dimanche 26 octobre 2008

Notre traduction de "Mercado de espejismo", Benito Benítez Pérez

Lors de la dernière séance d'atelier de traduction collective, nous nous sommes attaquées à la version proposée aux candidats de de la session 2008 du CAPES d'espagnol.
Voici notre traduction [avec cette précision indispensable qu'il ne s'agit nullement d'un corrigé ; les critères d'évaluation d'un jury notant des versions pour un recrutement national de futurs enseignants du secondaire et les nôtres – en particulier dans cette première phase d'apprentissage du métier de traducteur littéraire – ne sont, cela va de soi, pas les mêmes… On peut le regretter (le débat sur le décalage entre l'enseignement de la version et de la traduction est fort intéressant et nous aurons tout le loisir d'y revenir, si vous le souhaitez), mais c'est ainsi] :

Una de las pocas personas que vienen a casa es Lolo Letaud, asceta cincuentona que fue profesor de griego y de latín en un instituto hasta que, hará cosa de un lustro, se desengañó de la pedagogía al advertir un factor básico de incompatibilidad entre el ablativo absoluto y los abalorios de plata que adornaban las orejas, las narices, el ombligo y los labios de su alumnado,
al que Hélade le parecía un nombre de discoteca y al que los poemas de Virgilio le sonaban a jerga de tribu antropofágica, por no hacer mención siquiera de lo que sacaban en claro aquellos pupilos de una explicación relativa a los misterios de Eleusis, por ejemplo, porque Lolo se resistía a limitarse a la enseñanza de la lengua y procuraba ganarse a su clientela adolescente con esoterismos y mitologías, aunque ni por esas […]
Como nadie vive del aire, aunque él lo intentaba a brazo partido, Lolo Letaud anda empeñado desde que abandonó la enseñanza en escribir una novela de éxito popular, acogida al patrón moderno de los quimerismos históricos, y se dedica a manosear los temas que alimentan esa industria : la herejía cátara, el Grial, los enredos templarios, las intrigas vaticanas o los manuscritos del Mar Muerto, entre otros, todos ellos mezclados con exotismos científicos y con piruetas criptológicas. Pero el problema de Lolo Letaud es que siempre hay algún autor que se anticipa a las intrigas que él concibe, quemándole así sus invenciones, y se ve obligado a abandonar el proyecto en el cenit de la inspiración y el entusiasmo. « Yo tengo mala suerte, Jacob. Y no deja de ser una cosa misteriosa la mala suerte, ¿ verdad ? Une especie de voluntad averiada », y le digo que sí, por no saber qué otra cosa decirle.

Felipe BENITEZ REYES, Mercado de espejismos, ed. Destino, 2007.


En photo : le cheptel de l'enseignant
Un clin d'œil amical à l'ensemble du groupe

Une des rares personnes à venir à la maison est Lolo Letaud, ascète quinquagénaire, ancien professeur de latin et de grec dans un lycée, jusqu'à ce que, il y a de cela cinq ans environ, il soit revenu de l’enseignement en prenant conscience d’une incompatibilité basique entre l’ablatif absolu et la pacotille en argent qui ornait les nez, les oreilles et les nombrils de son cheptel d’élèves pour qui Hellade n’évoquait guère plus qu’un nom de discothèque et pour qui les poèmes de Virgile se résumaient à peu de choses près au jargon d’une lointaine tribu anthropophage. Sans même parler de ce que ces pauvres malheureux pouvaient bien comprendre à une explication relative aux mystères d’Éleusis, pour ne citer qu’un exemple; parce que Lolo renâclait à s’en tenir au strict apprentissage de la langue et s’efforçait de fourguer sa camelote à ses clients boutonneux en les gavant de références ésotériques et mythologiques… mais même avec cette pitance-là…
Comme personne ne vit d’amour et d’eau fraîche – ce que notre ami s’évertuait néanmoins à faire d’arrache-pied, Lolo Letaud n’a plus qu’une idée en tête : écrire un best-seller en s’abritant derrière le modèle moderne des chimérismes historiques. Il passe son temps à resucer les thèmes qui alimentent ce business : l’hérésie cathare, le Graal, les complots des Templiers, les magouilles du Vatican ou les manuscrits de la Mer morte, entre autres, le tout assaisonné à la sauce exotico-scientifico-cryptologique. Sauf que Lolo Letaud a un problème : il y a toujours un auteur pour lui griller la politesse dès qu’il tient une intrigue, réduisant en cendres ses idées. Et du coup, il est bien obligé de remballer son projet au paroxysme de l’inspiration et de l’enthousiasme. « Moi j’ai la poisse, Jacob. Et la poisse, ça ne laisse pas d’être une chose mystérieuse, tu trouves pas, toi ? Une sorte de volonté H. S. » Et je lui dis oui, ne sachant que lui répondre d'autre.

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