jeudi 8 avril 2010

À propos d'Arcoiris, une belle initiative d'une tradabordienne – Sonita Ferreira

Arcoiris – Escuela de Idiomas, est un Institut de langues âgé à peine de deux ans et qui a jeté l’ancre dans une petite ville portuaire située dans le Pacifique Sud du Mexique : Ixtapa-Zihuatanejo. Son nom, Zihuatanejo, vient du mot Nahuatl “Cihuatlan” qui signifie "lieu de femmes". Ici, on ne nait pas Zanka, on le devient. C’est en tout cas ce qu’affirment les habitants d’Ixtapa-Zihuatanejo qui se sont appropriés du mot “zanco“, terme désignant une sorte d’échafaudage qui sert à soutenir le cintre. Ainsi, un “zanco“ est un soutien et donc un ami !
C’est ce cadre, à connotation idyllique, que j’ai finalement choisi pour vivre et travailler.
Mais l’histoire commence un peu avant.
Lorsque j’étais encore sur les bancs de la fac j’avais déjà bien défini ma destination FLE. Enseigner le français à des étrangers oui, mais il me fallait connaître leur langue maternelle afin d’être plus à même de les aider dans leur apprentissage.
Je parle couramment le portugais, l’espagnol et l’anglais, mais j’ai su très vite que le Portugal ou un pays hispanophone serait mon point d’ancrage.
C’est d’abord à Valparaíso, au Chili, puis en Espagne, à Salamanque que j’ai fait mes armes. Ces expériences m’ont réconfortée dans mon choix d’enseigner dans un pays hispanophone où je pourrais mettre mes connaissances à l’épreuve, les renforcer et parfois aussi les démanteler et en construire d’autres.
Connaître les deux langues en présence me rassure et je crois dur comme fer qu’il n’y a pas de meilleure façon de mener ses apprenants à bon port que de décortiquer le rouage linguistique. Cela les rassure de se sentir en terrain connu me confient-ils quelques fois. C’est comme un pont qui se crée entre les deux langues.
Mes expériences de travail dans quelques pays hispanophones m’ont permis de découvrir un « autre » espagnol. Je pense notamment comment « maíz » devient « choclo » en chilien et « elote » en mexicain.
Bien que le mécanisme linguistique reste inchangé, ces quelques variations lexicales, appelées « modismos », que j’ai apprises sur le tas sont un plus dans la sphère de la traduction.
Avant mon arrivée sur Tradabordo je n’y avais pas vraiment pensé. Pour moi, ces termes n’étaient que du vocabulaire nouveau. Mais, une fois ici, au milieu de tous ces textes, venus de toutes parts, je crois que ce bagage extra est une richesse, une vraie perle : « palta» ; « frutilla » ou encore « cuche » n’ont plus de secrets pour moi !
Je dois dire qu’avant Tradabordo je ne m’étais jamais arrêtée à penser à la traduction en classe de langue. J’y ai recours bien sûr, comme je disais, ce n’est pas un hasard que j’ai choisi d’enseigner le FLE dans un pays hispanophone, mais je n’avais pas véritablement pris conscience de la façon dont je l’utilisais en classe.
Je sais, cependant, que je n’ai jamais été une adepte de la traduction au mot par mot. Bien que je me sois adoucie depuis (les années d’expérience sûrement !), je me souviens de ces moments de franche colère quand un apprenant me demandait ce que signifiaient tous et chacun des mots. Aaaarrrrgh ! « tu dois essayer de comprendre le sens général de ton texte. S’il y a des mots que tu ne comprends pas, ce n’est pas grave. Ne te mets pas toi-même plein d’obstacles dans ton chemin ! » Combien de fois n’ai-je pas assené cette phrase !
Puis, avec (grâce) à Tradabordo, j’ai commencé à m’observer enseigner. Oh, surprise ! Je passe beaucoup plus par la traduction de ce que je ne voulais bien l’admettre : lors d’une explication grammaticale complexe, pendant un texte où tous semblent buter sur un même mot ou que je crois savoir qu’ils ne connaissent pas. Sporadique, mais présente.
Aussi, il m’arrive de faire de la grammaire comparative où j’essaie de pointer les points communs entre les deux langues. Comme je l’ai déjà dit auparavant, la traduction est un pont, une aide indispensable dans le parcours d’apprentissage, cela met les apprenants en confiance, les rassure.
Je me laisse facilement embarquer dans cette jonque de la traduction finalement. Les apprenants en ont besoin et ce recours à la traduction les aide à mieux mémoriser, à établir des liens entre leur langue et celle qu’ils apprennent.
Pour terminer, je vous confie que j’ai aussi remarqué que le fait d’être en permanence en contact avec la langue espagnole (avec ses nuances mexicaines) me permet d’être à une bonne place pour éviter, pas toujours faut bien le dire, de tomber dans les faux sens quand j’ai un texte à traduire.
Bien entendu, j’en suis tout aussi consciente que c’est très important d’être en contact avec la langue cible pour éviter de tomber dans des aberrations de forme et structure linguistiques à dormir debout – « elle parle français celle-là ??! » – ou que simplement je tombe dans des hispanismes (Caroline tu te souviendras de mes « rames » pour branches… par exemple !).
Certes, je suis dans une position privilégiée, mais mon maigre contact (direct) avec la langue française me laisse parfois dans une situation fort inconfortable au moment de rendre un français « naturel », qui ne choque pas le lecteur. Pour un traducteur, je l’ai lu ici maintes fois, il est important de s’effacer aux yeux du lecteur, celui-ci ne doit pas remarquer sa présence.
Bien sûr, on m’a aussi dit que le mot d’ordre c’est de lire, lire, lire et encore lire, mais en ce qui me concerne c’est le contact moins littéraire avec la langue qui me fait terriblement défaut. Je ne veux pas parler comme un livre, non plus !!!
Ce qui m’amène alors à vous demander chers Tradabordiennes, Tradabordiens, si vous n’avez pas le sentiment que votre exposition à la langue de départ (espagnol) ne vous fait pas défaut à certains moments ?

D’intérêt lexical :
“palta “ = aguacate en Chile
“frutilla” = fresa en Chile
“cuche” = puerco en México, modismo de la región de Guerrero

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