samedi 24 avril 2010

Votre version de la semaine

Me despertaron los gorriones piando como locos en la azotea. Dice el señor Moro que la señora de Ladislao tenía la costumbre de echarles las migajas de pan de las sobras al levantarse. Así se explica que hubiera más de un ciento de ellos revoloteando entre las chimeneas y los tendederos. La madre llevaba un rato levantada, rutando porque no le tira la cocina. Debe de ser por el tiempo quedo, sin una brizna de viento. De todas formas a estas cosas hay que cogerles el punto flaco. La madre estaba hecha a la cocina de la otra casa y ésta le extraña. Además, la madre siempre anda dispuesta a protestar. Es su manera de ser. Todavía no ha hincado el pico. Se le ha ido el día recordando a la señora Rufina. A las siete me dijo: «¿Y qué hago yo a estas horas si no puedo sacar una silla a la puerta?» «Siéntese en la azotea, madre», le dije yo. Ella dijo: «Ya, a ver pasar los pájaros, ¿verdad?» A la mujer no le falta razón, pero cuando hemos cenado a la fresca, bajo un techo de estrellas, se le ha desarrugado el semblante. A medio comer me pidió la toquilla porque notaba el relente. Yo le dije que de cuándo acá había necesitado la toquilla en agosto. Al concluir, la llevé a la baranda para que contemplara las vistas. Ella se asomó y dijo: «Es muy hermosa nuestra ciudad, ¿verdad, hijo?» Desde la azotea se divisa un mar de luces y todo está en silencio, como muerto. Sólo de vez en cuando le asusta a uno el silbido de un tren. Cuando le mostré el Sagrado Corazón, se le alegró la cara y se santiguó: «Lo tenemos aquí cerquita, hijo. Casi al alcance de la mano», decía. La notaba sobrecogida porque el Sagrado Corazón, iluminado por una luz blanquecina, parece tal cual una aparición milagrosa.

Miguel Delibes, Diario de un cazador

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Laëtitia :

Les moineaux me réveillèrent en piaillant comme des fous sur la terrasse. Monsieur Moro dit que Madame de Ladislao avait coutume de leur jeter les miettes de pain des restes de la veille en se levant. C’est pourquoi il y en avait plus d’une centaine qui voletaient entre les cheminées et les étendoirs. La mère était levée depuis un moment, rouspétant parce que le fourneau de cuisine ne tirait pas bien. Ce doit être à cause du temps calme, pas un souffle de vent. De toutes manières ces choses-là, il faut les prendre par leur point faible. La mère était habituée au fourneau de l’autre maison et celui-ci, elle ne s’y fait pas. De plus, la mère est toujours disposée à protester. C’est sa façon d’être. Elle n’a pas encore rendu l’âme. Elle a passé sa journée à se rappeler Madame Rufina. A sept heures, elle me dit : « Et qu’est-ce que je fais à cette heure-ci si je ne peux pas sortir une chaise sur le pas de la porte ? » « Asseyez-vous sur la terrasse, mère », lui dis-je. Elle répondit : « C’est ça, pour voir passer les oiseaux, pas vrai ? » La femme ne manque pas de discernement, mais quand nous avons dîné à la fraîche, sous une voûte étoilée, son expression s’est déridée. Au milieu du repas elle me demanda son châle parce qu’elle sentait la fraîcheur du soir. Je lui demandai depuis quand ici elle avait eu besoin de son châle en août. Pour finir, je l’amenai à la balustrade pour qu’elle contemple la vue. Elle s’avança et dit : « Notre ville est très belle, n’est-ce pas, mon fils ? » Depuis la terrasse on distinguait une mer de lumières et tout était silencieux, comme mort. De temps en temps seulement on a peur du sifflement d’un train. Lorsque je lui montrai le Sacré Cœur, sa figure se réjouit et elle se signa : « Il est tout près de nous, mon fils. Presque à portée de main », disait-elle. Je trouvais qu’elle était effrayée parce que le Sacré Cœur, illuminé par une lumière blanchâtre, a tout d’une apparition miraculeuse.

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Laëtitia Sw. nous propose sa traduction :

Je fus réveillé par les moineaux qui pépiaient comme des fous sur la terrasse. Monsieur Moro dit que madame de Ladislao avait l’habitude, à son lever, de leur jeter les restes de pain émiettés. Cela explique qu’il y en eût plus d’une centaine qui voletait entre les cheminées et les étendoirs. Ma mère était debout depuis un moment, elle rouspétait parce que le fourneau de la cuisine ne tire pas. Ce doit être à cause du temps calme, sans le moindre brin de vent. De toute façon, il faut pointer la faiblesse de ce genre de choses. Ma mère est habituée au fourneau de l’autre maison, pas à celui-ci. Et puis, ma mère est toujours encline à râler. C’est sa manière d’être. Elle n’a pas encore cassé sa pipe. Elle a passé la journée à se rappeler madame Rufina. À sept heures, elle me dit : « Qu’est-ce que je vais faire, moi, à cette heure-ci, si je ne peux pas sortir une chaise devant la porte ? » « Asseyez-vous sur la terrasse, mère », lui répondis-je. Et elle : «C’est ça, pour regarder passer les oiseaux peut-être ? » Elle n’a pas tort mais, après avoir dîné à la fraîche, sous un toit d’étoiles, son visage s’est détendu. À mi-repas, elle me réclama son fichu parce qu’elle sentait l’humidité du soir. Je lui demandai depuis quand, ici, elle avait besoin de son fichu au mois d’août. Finalement, je l’amenai à la balustrade pour contempler la vue. Elle se pencha et dit : « Elle est très belle, notre ville, pas vrai, mon fils ? » Depuis la terrasse, on aperçoit une mer de lumières, tout est silencieux, comme mort. On est seulement effrayé de temps à autre par le sifflement d’un train. Quand je lui montrai le Sacré Cœur, sa figure s’anima et elle se signa : « Nous l’avons là, tout près, mon fils. Presque à portée de main », disait-elle. Je remarquai qu’elle était surprise parce que le Sacré Cœur, illuminé par une lumière blafarde, a l’air d’une apparition miraculeuse.

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Sonita nous propose sa traduction :

Ce furent les moineaux qui piaillaient comme des fous sur le toit qui me réveillèrent. Monsieur Moro dit que madame de Ladislao avait pour habitude de leur donner les miettes des restes de pain en se levant. Cet ainsi qu’on explique qu’il y en eût plus d’une centaine d’eux qui voletaient entre les cheminées et les cordes à linge.
La mère était debout depuis un bon moment déjà, rouspétant parce que le fourneau de la cuisine ne fonctionnait pas bien. Cela doit être à cause du temps tranquille, sans un brin de vent. De toute façon il faut trouver à ces choses-là leur point faible. La mère était habituée à la cuisine de l’autre maison et celle-ci lui est étrangère. De plus, la mère est toujours d’humeur grognonne. C’est sa manière d’être. Elle n’a toujours pas plié le bec. Elle a passé sa journée à se souvenir de madame Rufina. À sept heures elle me dit : « Et, qu’est-ce que je fais à cette heure-ci si je ne peux pas mettre une chaise sur le pas de la porte ? » « Asseyez-vous sur la terrasse, mère », lui dis-je. Elle dit : « Bien sûr, pour voir les oiseaux passer, n’est-ce pas ? ». Et elle n’a pas tord la bonne femme, mais quand nous avons dîné dehors, sous un toit d’étoiles, son visage s’est détendu. Au milieu du dîner elle me demanda son châle parce qu’elle sentait la fraîcheur du soir. Je lui dis que depuis quand avait-elle eu besoin de châle en août. À la fin du repas je l’emmenai sur le balcon afin qu’elle puisse contempler la vue. Elle se pencha et dit : « Elle est très belle notre ville, n’est-ce pas mon fils ? » Depuis la terrasse on voit une mer de lumières et le silence règne, comme mort. Seulement de temps en temps l’on est effrayé du sifflement d’un train. Quand je lui eu montré le Sacré Cœur, son visage se réjouit et elle se signa : « Nous l’avons tout près, mon fils, presqu’à portée de main », disait-elle. Je la remarquai saisie d’effroi, parce que le Sacré Cœur, illuminé par une lumière blanchâtre, ressemble à une apparition miraculeuse.

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