dimanche 23 janvier 2011

Exercice d'écriture : « Coupure d'électricité », par Olivier Marchand

En photo : accouchement
par m1l35

Voici donc l'exercice d'écriture d'Olivier. Je ne peux manquer de vous joindre le mail de présentation qui l'accompagnait :

« J'ai enfin fini par accoucher de cet exercice d'écriture : la parturition a été difficile mais voici, après de nombreuses heures de travail en salle d'accouchement, le malingre bébé.
Comme tu pourras le remarquer, j'ai un peu triché (enfin, je dirais plus "joué avec les mots" !). Je me suis creusé la tête pendant plusieurs jours sans trouver d'intrigue, alors j'ai décidé d'assumer mon "hors-sujet" (qui n'en est pas tout à fait un) ainsi que mes complexes d'Oedipe (sur le saut de grenouille) et d'Electre (sur celui d'aujourd'hui).
Maintenant que la psychanalyse est fini, me voilà soulagé. »

Dissimulée sous une panne, j'avance dans la cité d'Électre. La riche étoffe qui me recouvre, achetée à un marchand d'Athènes, servira à étouffer le crime salvateur que je m'apprête à commettre. Ombre anonyme, marchande d'une mort certaine, je suis résolue à accomplir la mission qui m'a été confiée.
Je pressentais ce à quoi ma naissance me destinait mais, pendant bien des années, je me suis cachée de cette effroyable vérité. J'ai fui la réalité, je me suis bercée de chimères jusqu'à ce jour où les paroles avisées des Pythies sont venues confirmer mes craintes les plus profondes et ont scellé mon destin.
Le couteau au manche de nacre que je tiens à la main sera le pinceau qui mélangera le carmin de son sang au blanc marmoréen de la pierre. Ce n'est que lorsque cette lame de fer coupera sa laiteuse chair que les miens pourront vivre sereinement, sans plus jamais subir l'horrible sort que les Dieux nous réservaient jusque là. J'ai craint de ne jamais en être capable, j'ai eu peur que les remords m'assaillent, mais mon existence n'aura de sens que lorsque ses yeux, à jamais, se fermeront. Elle a séquestré ma joie, elle a bafoué mon honneur et violé ma nature ; je saurai l'affronter. Je n'ai jamais voulu devenir cette harpie sanguinaire, mais un seul instant à ses côtés a suffi à me transformer. Elle a fait de moi cet impétueux serpent et je ne retrouverai l'innocence et le calme que lorsque mes venimeux crochets se planteront en elle. Je l'ai vue tuer les miens, je l'ai vue ricaner de leur mort, je doute qu'aujourd'hui, elle puisse rire encore.
L'heure est venue. Impassible, je laisse derrière moi la lumière vespérale et les délicates effluves marines. Je m'en vais, sur l'autel de la vengeance, sacrifier ma mère.

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