mercredi 25 janvier 2012

Version pour Benoît

A las tres de la tarde entró doña Manuela en la plaza del Mercado, envuelto el airoso busto en un abrigo cuyos faldones casi llegaban al borde de la falda, cuidadosamente enguantada, con el limosnero al puño y velado el rostro por la tenue blonda de la mantilla.
Tras ella, formando una pareja silenciosa, marchaban el cochero y la criada: un mocetón de rostro carrilludo y afeitado, que respiraba brutal jocosidad, luciendo con tanta satisfacción como embarazo los pesados borceguíes, el terno azul con vivos rojos y botones dorados y la gorra de hule de ancho plato, y a su lado,  una muchacha morena y guapota, con peinado de rodete y agujas de perlas, completando este tocado de la huerta su traje mixto,  en el que se mezclan los adornos de la ciudad con los del campo.
El cochero, con una enorme cesta en la mano y una espuerta no menor a la espalda,  tenía la expresión resignada y pacienzuda de la bestia que presiente la carga. La muchacha también llevaba una cesta de blanco mimbre,  cuyas tapas movíanse al compás de la marcha, haciendo que el interior sonase a hueco; pero no se preocupaba de ella,  atenta únicamente a mirar con ceño a los transeúntes demasiado curiosos o pasear ojeadas hurañas de la señora al cochero o viceversa.

Vicente Blasco Ibáñez, Arroz y tartana

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Benoît nous propose sa traduction :

À trois heures de l’après midi, doña Manuela arriva sur la place du marché, son gracieux buste enveloppé dans un manteau dont les basques atteignaient presque le bas de sa jupe, soigneusement gantée, tenant l’aumônier par la main, le visage voilé par la fine dentelle de sa mantille.
Derrière elle, en un couple silencieux, marchaient le cocher et la domestique : un jeunot, le visage joufflu et rasé, qui faisait montre d’une grande cocasserie, portant avec autant de satisfaction que de gêne ses lourds brodequins, son complet bleu, teinté de rouge vif , avec des boutons dorés et sa casquette en toile cirée à grande visière, et à ses cotés, une jeune femme brune et bien belle, les cheveux en chignon maintenus par des aiguilles de perles, complétant cette coiffure paysanne par son costume mixte, lequel mélangeait les ornements citadins avec ceux de la campagne.
Le cocher, un énorme panier à la main et une hotte non moins grande sur le dos, avait un air de résignation et plein de patience tel la bête qui pressent la charge. La jeune femme aussi portait un panier en osier blanc dont les battants bougeaient au rythme de la marche, faisant que l’intérieur sonnât creux ; mais elle n’y prêtait pas attention, occupée uniquement à regarder en fronçant les sourcils les passants trop curieux ou à promener des regards farouches de la dame au coche ou vice-versa.


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Florence nous propose sa traduction :

À trois heures de l'après-midi, doña Manuela fit son entrée sur la place du Marché, son buste gracieux enveloppé dans un manteau dont les pans atteignaient presque le bord de sa jupe, soigneusement gantée, l'aumônière à la main et le visage voilé par la fine dentelle de la mantille. 
Derrière elle, formant un couple silencieux, avançaient le cocher et la domestique : un beau garçon au visage joufflu et rasé, qui respirait une drôlerie extraordinaire, exhibant avec autant de satisfaction que d'embarras ses lourds brodequins, son complet bleu agrémenté de rouges vifs et de boutons dorés, et son béret de toile à large bord, et à ses côtés, une jeune fille brune de belle allure, coiffée d'un chignon et de petites épingles perlées, complétant cette coiffure maraîchère sa tenue mixte, dans laquelle se mêlaient les ornements de la ville avec ceux des champs. 
Le cocher, un énorme panier en main et un cabas non moindre sur le dos, affichait l'expression résignée et patiente de la bête qui pressent la charge. La jeune fille portait également un panier en osier blanc, dont les couvercles bougeaient au rythme de la marche, faisant ainsi en sonner creux l'intérieur ; mais il ne s'inquiétait pas pour elle, appliquée uniquement à regarder avec irritation les passants trop curieux ou à promener des yeux farouches de la femme au cocher ou vice versa.

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Justine nous propose sa traduction :
À quinze heures, doña Manuela s’engagea sur la place du Marché. Son buste élégant était enveloppé dans un manteau dont les pans arrivaient presque à hauteur de sa jupe, elle était soigneusement gantée, avait son aumônière accrochée au poignet et le visage voilé par la soie fine de sa mantille.
Derrière elle, formant un couple silencieux, marchaient son cocher et sa domestique : lui, un grand gaillard au visage joufflu et rasé, qui respirait vraiment la jovialité, exhibait aussi satisfait qu’embarrassé ses lourds brodequins, son complet bleu à galons rouges et boutons dorés, et sa casquette en toile à larges bandes. Et à ses côtés, une jeune fille brune, assez jolie, coiffée d’un chignon tenu par des épingles dotées de perles. En complément de cette coiffure champêtre, elle revêtait une tenue mixte, où les atours de la ville se mélangeaient avec ceux des champs.
Le cocher, un énorme panier à la main et un cabas aussi volumineux sur le dos, avait l’expression résignée et très patiente de la bête qui pressent la charge. La jeune fille portait aussi un panier en osier blanc, dont les anses bougeaient au rythme de ses pas, ce qui faisait qu’à l’intérieur ça sonnait le creux ; mais on ne s’inquiétait pas d’elle, qui n’avait d’autre occupation que de regarder, en fronçant les sourcils, les passants trop curieux, ou de jeter de furtifs coups d’œil de sa maîtresse au cocher ou vice-versa.

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