samedi 19 mai 2012

Version à rendre pour le 18 mai

¿Qué tenía en común con aquellas gentes que se encaramaban a un podium colectivo para que les pusieran las medallas del olimpismo? Contempló por televisión la llegada de la antorcha olímpica, la fiesta greco-catalana de recepción y lo mejor fue la espléndida muchacha que llevó la antorcha a tierra firme para que iniciara un paseo por toda España, en manos de políticos, deportistas y cualquier otra gloria local, en pos de marcar un territorio épico a la vez que zoológico. Si lo hubieran presentado como una fiesta recaudatoria de fondos para mejorar la ciudad o la especie residual celtibérica o le hubieran preguntado, al menos, si valía la pena mejorarla, Carvalho se hubiera abstenido igual, pero al menos habría aceptado el pringue de las personas, las cosas y los días, dejándose llevar por un verano más verano que los otros:

Siempre se espera un verano
mejor
y propicio para hacer
lo que nunca se hizo.

Había cantado un poeta de adolescencia contemporánea a la de Carvalho, de la que le llegaban poemas rotos que alguna vez había leído o incluso le habían leído:

No hubo fornicación
y la muchacha vive todavía.

¿De quién era? Qué más daba. La sensación de extranjería la llevaba en los huesos, como un frío intransferible, parecida a la que había sentido en los Getsemanís del franquismo, desde un exilio interior al que entonces le empujaba la obscenidad de la dictadura y ahora la inmensa, implícita presión de las multitudes olímpicas le empujaba al arcén de los coches deprimidos que no quieren correr porque han dejado de creer en la carrera. Durante diecisiete días la ciudad estaría ocupada por una amplia minoría de deportistas practicantes y por una inmensa mayoría de deportistas de palabra, pensamiento y omisión. Una ciudad ocupada por gente disfrazada de saludable puede llegar a ser insoportable y más insoportable todavía si, a causa de los Juegos Olímpicos, la ciudad se ha hecho la cirugía estética y de su rostro han desaparecido importantes arrugas de su pasado. Reyes, presidentes de repúblicas probables, la insoportable levedad del ser de todos los miembros del COI, gordos y gordas con las mochilas llenas de filosofía olímpica negados para siempre a distinguir entre los caníbales y sus víctimas y a las puertas de la ciudad acampados, en espera de su oportunidad neologizada, los paralímpicos, eufemismo de otro eufemismo, los disminuidos, para protagonizar a continuación la olimpiada de la piedad peligrosa en el marco de una sociedad que sólo se preocupa de sus disminuidos cuando consiguen meter goles con la nariz. Carvalho decidió recurrir a un sucedáneo de suicidio metafísico que había ensayado en sus tiempos de deprimido histórico, cuando debía convivir con la excelente salud del cadáver del franquismo y el general permanecía como un muñeco embalsamado en vida, sólo capaz de mover el brazo y la pistola, obstinado en permanecer en el escenario del crimen, como convidado de piedra en los escenarios de su propia obsolescencia de bárbaro primum inter pares. Vaciar una habitación, cerrarla a cal y canto, con Carvalho dentro, desnudo, sin otro nexo con el pasado y el futuro que un frigorífico lleno de alimentos populares y fantasiosos perecederos y un jamón, como recurso alimentario vinculable con la eternidad. La cultura metafísica y gastronómica de Carvalho había mejorado mucho desde sus crisis de finales de los sesenta y esta vez decidió encerrarse en su casa de Vallvidrera, puertas y ventanas selladas, incluso ranuras y rendijas, con cinta aislante. El cuerpo todo lo desnudo que exigía el verano y la angustia, pero con el breve slip que reclama el sentido del ridículo a partir de los cincuenta años y tanto en el frigorífico como en la despensa, de Chez Fauchon para arriba, sin descuidar productos gastronómicos españoles que hubieran conseguido superar con dignidad las asechanzas de la posmodernidad, que tantos estragos ha causado en la cultura del mercado del paladar.

Manuel Vázquez Montalbán, Sabotaje olímpico

***

Florian nous propose sa traduction :

Qu'avait-il en commun avec ces gens-là, qui se perchaient sur un podium collectif pour qu'on leur mette une médaille olympique? Il avait regardé à la télévision l'arrivée de la flamme olympique, la fête gréco-catalane pour l'accueillir et, le meilleur de tout, la splendide jeune fille qui avait porté la flamme jusqu'à la terre ferme pour qu'elle entame un périple à travers toute l'Espagne, dans les mains d'hommes politiques, de sportifs et de n'importe quelle autre gloire locale, en vue d'atteindre un territoire épique et zoologique à la fois. S'ils l'avaient présenté comme une cérémonie de récolte de fonds pour améliorer la ville ou l'espèce résiduelle celtibérique, ou s'ils avaient, au moins, demandé si cela valait la peine de l'améliorer, Carvalho se serait tout autant abstenu, cependant là, il aurait toléré la présence crasseuse de ces individus, les choses et les jours, se laissant porter par un été plus estival que les autres:

On espère toujours un été 
meilleur
et propice pour faire
ce qu'on a jamais fait.

Voilà ce que chantait un poète de la même tranche d'âge que Carvalho, à l'époque où lui venaient à l'esprit des poèmes en vrac qu'un beau jour il avait lu, ou plus précisément, qu'il lui avait lu: 

Il n'y a pas eu de fornication
mais la demoiselle est encore vivante.

De qui était-ce? Cela importait peu. La sensation d'extranéité s'imprégnait de lui tel un froid immuable, semblable à celle qu'il avait ressentie durant les Gethsémanis du franquisme, lorsqu'alors, c'était l'obscénité de la dictature qui le conduisait à l'exil intérieur, mais aujourd'hui, c'est l'immense, l'implicite foule olympique qui le conduisait sur le bas-côté des voitures déprimées ne voulant plus rouler parce qu'elles ont cessé de croire en la course. Dix-sept jours durant, la ville allait être occupée par une large minorité de sportifs pratiquants, et par une ample majorité n'ayant de sportif que le nom, l'esprit et l'allure. Une ville assiégée par des gens déguisés en homme de parfaite santé peut devenir insupportable, 
et d'autant plus insupportable encore si, à cause des Jeux Olympiques, la ville s'est offert une chirurgie esthétique faisant disparaître de son visage d'importantes traces du passé. Les rois et reines, les présidents des probables républiques, l'exaspérante inconstance de l'être chez tous les membres du COI, gros et grosses avec leurs sacs remplis de philosophie olympique, sans cesse incapables de distinguer les cannibales de leurs victimes, et, postés aux portes de la ville, dans l'attente de jouir d'une opportunité  créée de toute pièce, les athlètes paralympiques, euphémisme d'un autre euphémisme, les handicapés, afin par la suite, d'être les acteurs des olympiades de la piété néfaste au sein d'une société qui ne se préoccupe de ses handicapés que lorsqu'ils parviennent à mettre des buts avec le nez. Carvalho décida de recourir à un succédané de suicide métaphysique qu'il avait testé lors de sa période de déprimé historique, quand il devait cohabiter avec le cadavre en excellente santé du franquisme où le général demeurait comme un pantin embaumé dans la vie, juste capable de bouger son bras et son pistolet, entêté à perdurer sur le lieu du crime, pétrifié sur les planches de sa propre obsolescence de barbare primum inter pares. Vider une pièce, la fermer à double tour, avec Carvalho à l'intérieur, nu, sans aucune autre attache avec le passé et le futur qu'une chambre froide remplie d'aliments pouvant être liés à l'éternité. La culture métaphysique et gastronomique de Carvalho s'était beaucoup améliorée depuis ses crises de la fin des années soixante, et cette fois, il choisit de s'enfermer dans sa maison de Vallvidrera, portes et fenêtres scellées, y compris les rainures et les fentes, avec une bande isolante. Le corps aussi dénudé que l'exigeait l'été et l'angoisse, mais avec le simple slip que réclame le sens du ridicule à partir des cinquante ans, tant dans la chambre froide que dans le garde-manger, de Chez Fauchon situé plus haut, sans négliger les produits gastronomiques espagnols qui seraient parvenus à éviter avec dignité les embûches de la postmodernité, qui a causé tellement de dégâts dans la culture du marché de la saveur.

***

Justine nous propose sa traduction :

Qu’avait-il en commun avec ceux qui montaient sur un podium collectif  pour recevoir des médailles olympiques ? Il regarda à la télévision l’arrivée de la flamme olympique, la cérémonie d’ouverture gréco-catalane et le mieux fut la splendide jeune femme qui apporta la flamme sur la terre ferme pour qu’elle entame un tour d’Espagne, en passant dans les mains de politiciens, de sportifs, et de n’importe quelle autre gloire locale désireuse de marquer un territoire épique autant que zoologique. Si on avait présenté cette cérémonie comme une fête visant à collecter des fonds pour améliorer la ville ou l’espèce résiduelle celtibère, ou si au moins on lui avait demandé si cela valait la peine de la rénover, Carvalho se serait également abstenu, mais aurait néanmoins accepté la crasse des gens, des choses et des jours, en se laissant gagner par un été plus estival que les autres :

On espère toujours un meilleur été,
propice pour faire
ce que l’on n’a jamais fait.

Voilà ce qu’avait chanté un poète contemporain de Carvalho pendant son adolescence, d’où lui revenaient des bribes de poèmes qu’il avait lu un jour ou même qu’on lui avait lu :

Il n’y a pas eu fornication
et la jeune fille vit toujours.

De qui était-ce ? Peu importait. La sensation d’extranéité il la portait dans sa chair, comme un froid intransférable, semblable à celle qu’il avait ressentie dans les Gethsémanies du franquisme, depuis un exil intérieur auquel le poussait alors l’obscénité de la dictature ; et désormais l’immense pression implicite des foules olympiques, le poussait sur le bas-côté avec les voitures fatiguées : celles qui ne veulent pas courir, parce qu’elles pensent que leur carrière est terminée. Pendant dix-sept jours, la ville serait occupée par une large minorité de sportifs assidus et par une immense majorité de sportifs qui en parlent, y pensent puis oublient. Une ville envahie par des gens, déguisés en personnes saines, peut devenir insupportable et plus insupportable encore, si à cause des Jeux Olympiques, la ville a eu recours à la chirurgie esthétique et que de son visage ont disparu d’importantes rides de son passé. Des rois, de probables présidents de la république, l’insupportable légèreté de tous les membres du COI, des gros et des grosses dont les sacs à dos sont pleins de philosophie olympique, qui se refusent pour toujours à faire une différence entre les cannibales et leurs victimes et qui campent aux portes de la ville, en attendant leur opportunité néologique : les Jeux Paralympiques ; euphémisme d’un autre euphémisme, les diminués, pour prendre part ensuite aux olympiades de la pitié, dangereuses dans le cadre d’une société qui ne se préoccupe de ses citoyens handicapés que quand ils arrivent à marquer des buts avec le nez. Carvalho décida de recourir à un succédané de suicide métaphysique qu’il avait essayé lors de sa période de déprimé historique, lorsqu’il devait cohabiter avec le cadavre du franquisme en excellente santé, et que le général demeurait en vie comme un pantin embaumé, tout juste capable de bouger le bras et son pistolet, obstiné à rester sur la scène du crime, tel un convive de pierre sur les lieux de sa propre désuétude de barbare, le premier entre ses pairs. Vider une pièce, la fermer à double tour, Carvalho à l’intérieur, nu, sans autre lien avec le passé et le futur qu’un réfrigérateur rempli d’aliments populaires et de fameuses denrées périssables et d’un jambon, comme produit consommable à relier à l’éternité. La culture métaphysique et gastronomique de Carvalho, s’était grandement améliorée depuis ses crises à la fin des années soixante-dix et cette fois, il décida de s’enfermer dans sa maison de Vallvidrera, d’en sceller les portes, les fenêtres, même les rainures et les fentes, avec de l’isolant. Le corps aussi nu que l’exigeaient l’été et l’angoisse, mais avec le petit slip que réclamait le sens du ridicule à partir de cinquante ans et un réfrigérateur comme un garde-manger qui déborde de réserves de Chez Fauchon, sans oublier les produits gastronomiques espagnols qui, avaient réussi à surmonter avec dignité les embûches de la postmodernité, qui ont causé tant de dégâts dans la culture du marché du palais.

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Danièle nous propose sa traduction :

Qu’avait-il de commun avec ces gens qui se hissaient sur un même podium pour qu’on leur remette les médailles olympiques ? Il regarda avec intérêt à la télévision l’arrivée de la flamme olympique, la fête gréco-catalane de la cérémonie d’ouverture. Le mieux, ce fut la splendide jeune fille qui porta la flamme sur la terre ferme afin qu’en plus de délimiter un territoire à la fois épique et zoologique, celle-ci commençât une promenade à travers toute l’Espagne aux mains de politiques, de sportifs et de quelconques  autres gloires locales.  Si on lui avait présenté comme une fête de collecte de fonds afin d’améliorer la ville ou l’espèce celtibérique restante ou si seulement on lui avait demandé de l’améliorer, Carvalho se serait abstenu pareillement, mais au moins il aurait accepté la crasse poisseuse des personnes, des choses et des jours, en se laissant faire par un été plus été que les autres :

On attend toujours un été
meilleur
et propice à faire
ce que l’on ne fit jamais.

Il avait chanté un poète contemporain de l’époque de son adolescence, de celle où on lui apportait des bouts de poèmes  qu’il avait quelquefois lus ou même qu’on lui avait lus :

Il n’y eut pas fornication
et la jeune fille vit toujours.

De qui était-il ? Cela importait peu. Il ressentait ,comme un froid interne jusque dans ses os, la sensation de se sentir un étranger, pareille à celle qu’il avait éprouvée dans le Jardin des Oliviers du franquisme depuis son exil intérieur où l’obscénité de la dictature le retranchait alors, et qui maintenant le poussait  sur le bas-côté des voitures démoralisées qui ne veulent plus courir car elles ont cessé de croire en la course.
 Durant dix-sept jours, la ville serait occupée par une grande minorité de sportifs pratiquants et par une immense majorité de sportifs en paroles, en pensées et par omission. Une ville occupée par des gens  déguisés en sains de corps et d’esprit  peut arriver à être insupportable et plus insupportable encore si à cause des Jeux Olympiques elle s’est fait faire de la chirurgie esthétique et que de son visage ont disparu les rides remarquables de son passé. Des rois, des présidents de républiques reconnus, l’insupportable légèreté de l’être de tous les membres du COI, des gros et des grosses aux sacs à dos remplis de philosophie olympique se refusant pour toujours à distinguer les cannibales des victimes, campés aux portes de la ville, dans l’attente d’une opportunité néologique, les pseudolympiques, euphémisme d’un autre euphémisme, les diminués, pour prôner tout de suite l’olympiade de la pitié dangereuse dans le cadre d’une société qui se préoccupe de ses diminués seulement quand ils réussissent à marquer des buts avec le nez.
Carvalho décida de recourir à un succédané de suicide métaphysique qu’il avait essayé lors de sa période de déprimé historique, quand il devait cohabiter avec l’excellente santé du cadavre du franquisme et que le général subsistait comme un pantin embaumé en vie, capable seulement de remuer le bras et le pistolet, comme un invité de pierre dans les scènes de sa propre péremption de barbare primum inter pares .
Vider une chambre, la fermer à double tour, avec Carvalho à l’intérieur, nu, sans autre lien avec le passé et le futur  qu’un frigidaire rempli d’aliments courants et fantaisistes périssables et avec un jambon comme recours alimentaire lié pour l’éternité. La culture métaphysique et gastronomique de Carvalho s’était beaucoup améliorée depuis ses crises de la fin des années soixante et cette fois, il décida de s’enfermer dans sa maison de Vallvidrera, portes et fenêtres scellées jusqu’aux rainures et aux fentes avec du ruban isolant. Le corps complètement nu qui exigeait l’été et l’angoisse, mais avec un simple slip qu’appelle le sens du ridicule à partir de cinquante ans, et tant dans le frigidaire que dans le garde à manger, de chez Fauchon , pour l’extra, sans oublier des produits gastronomiques espagnols qui eussent réussi à surmonter avec dignité les pièges de la post-modernité qui ont causé tant de ravages dans la culture du marché du goût.

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Manon nous propose sa traduction :


Qu’avait-il en commun avec ces gens qui grimpaient sur le podium collectif pour se voir remettre les médailles olympiques ? Il contempla à la télévision l’arrivée du flambeau olympique, la cérémonie gréco-catalane, et le meilleur fût lorsque cette fille splendide apporta le flambeau à bon port pour que débute un relais à travers toute l’Espagne, passant par les mains de politiques, de sportifs et de quelque autre représentant de la gloire locale, dans le but de marquer un territoire épique et zoologique à la fois. S’ils lui avaient présenté comme une fête de collecte de fonds pour améliorer la ville ou l’espèce résiduelle celtibérique, ou s’ils lui avaient demandé, au moins, si cela valait la peine de l’améliorer, Carvalho se serait abstenu tout autant, mais il aurait au moins accepté la crasse des gens, des choses et des jours, en se laissant aller à un été plus estival que les autres :


Toujours l’on attend un été
meilleur
et propice pour faire
ce que l’on n’a jamais fait.

Carvalho avait chanté les paroles d’un poète contemporain de son adolescence, d’où lui venaient des poèmes déchirés qu’il avait lus une fois ou même qui, eux, avaient lu en lui :

Il n’y eut aucune fornication,
la fille vit encore.

De qui était-ce ? Peu importait. Une sensation étrange lui parcourait les os, comme un froid intransmissible, pareille à celle qu’il avait ressentie dans les Gethsémanis du franquisme, depuis l’exil intérieur auquel l’avait alors poussé l’obscénité de la dictature. Aujourd’hui, la pression immense et implicite de la foule olympique le poussait sur le bas-côté, celui des voitures déprimées qui ne veulent plus courir parce qu’elles n’ont plus foi en la course. Dix-sept jours durant, la ville serait occupée par une grande majorité de sportifs pratiquants et par une majorité de sportifs de parole, de pensée et d’omission. Une ville occupée par des gens déguisés en personnes salutaires peut devenir insupportable, et plus insupportable encore si, en raison des Jeux Olympiques, cette ville est passé par la chirurgie esthétique et que d’importantes rides de son passé ont disparu de son visage. Rois, présidents de la République potentiels, l’insoutenable légèreté de l’être de tous les membres du CIO, gros et grosses aux sacs remplis de philosophie olympique, incapables de distinguer à jamais les cannibales de leurs victimes et, aux portes de la ville, campés dans l’attente de leur chance néologisée, les paralympiques, euphémisme d’un autre euphémisme, les handicapés, sont là pour continuer à être les acteurs de l’olympiade de la piété, dangereuse dans le cadre d’une société qui se préoccupe de ses handicapés seulement lorsqu’ils réussissent à mettre des buts avec leur nez. Carvalho décida d’avoir recours à un succédané de suicide métaphysique qu’il avait expérimenté pendant ses périodes de déprime historique, lorsqu’il devait vivre avec une excellente santé de cadavre du franquisme et que le général restait comme une poupée embaumée vivante, seulement capable de bouger le bras et le pistolet, obstiné à persister dans le scénario du crime, pétrifié dans les scénarios de sa propre obsolescence de barbare primum inter pares. Vider une pièce, la fermer à double tour, Carvalho à l’intérieur, nu, sans autre lien avec le passé ou le futur qu’un réfrigérateur rempli d’aliments populaires, de prétentieux périssables et d’un jambon comme ressource alimentaire potentiellement liée à l’éternité. La culture métaphysique et gastronomique de Carvalho s’était beaucoup améliorée depuis ses crises de la fin des années soixante, et, cette fois, il décida de s’enfermer dans sa maison de Vallvidrera, portes et fenêtres scellées, fentes et rainures comprises, avec du ruban isolant. Il était le corps aussi nu que l’exigeaient l’été et l’angoisse, avec tout de même un petit slip qui nécessite d’avoir le sens du ridicule à partir des cinquante ans, et dans le réfrigérateur comme dans le garde-manger, au-delà de Chez Fauchon, il ne négligeait pas les produits gastronomiques espagnols qui eussent réussi à dépasser avec dignité les pièges de la postmodernité qui a causé tant de ravages dans la culture du marché du goût.

1 commentaire:

Danièle a dit…

Bonsoir à tous,
A propos de la version sur le texte de Montalbán, une phrase entre autres m'a posé problème. La voici :“El cuerpo todo lo desnudo que exigía el verano y la angustia”.Le sujet me paraissait être “el verano y la angustia” et cependant le verbe n’est pas au pluriel. Comme il ne doit pas y avoir de fautes dans son texte (! ) “exigía” alors s’accorderait avec “El cuerpo todo lo desnudo” → Le corps complètement nu qui exigeait l’été et l’angoisse” ce qui est bizarre...
C’est d’ailleurs comme cela que je l’ai traduit mais sans conviction. J’ai vu que dans deux traductions, les personnes avaient écrit “exigían”.
Qu'en pensez-vous ?
Danièle (nouvelle inscrite).